Considérer le sexe et le genre dans la recherche en santé : un impératif éthique

À titre de principal organisme de financement de la recherche en santé au Canada, les IRSC sont résolus à promouvoir une recherche en santé qui répond aux normes les plus élevées d’excellence et d’éthique. Pour en savoir plus.

Contexte

L’évidence de la preuve

Pour être en accord avec les principes éthiques, la recherche doit prendre en compte les différences biologiques (liées au sexe) et sociales (liées au genre) entre les femmes, les hommes, les garçons, les filles et les personnes de divers genres. Plusieurs travaux ont mis en évidence que le sexe est associé à des différences considérables sur le plan de la gravité, de la fréquence, des symptômes et de l’âge d’apparition de plusieurs maladiesNote en bas de page 1,Note en bas de page 2,Note en bas de page 3,Note en bas de page 4,Note en bas de page 5,Note en bas de page 6,Note en bas de page 7. De plus en plus de données probantes indiquent que ces phénomènes dépassent largement les aspects hormonaux et reproducteurs; ils illustrent qu’on ne peut présumer que les résultats obtenus chez un sexe s’appliquent nécessairement à l’autre sexe. Pour en savoir plus.

Le sexe en tant que variable biologique

L’inclusion d’animaux et de cellules femelles dans la recherche fondamentale est non seulement une question de rigueur scientifique; elle vise aussi à favoriser une répartition juste et équitable des retombées de la recherche pour toute la population. Lorsque des expériences biomédicales ou précliniques sont menées sur des cellules et des animaux des deux sexes, il arrive souvent que des différences jusqu’alors inconnues soient mises en évidence. Cependant, dans plusieurs disciplines, on retrouve encore des chercheurs qui continuent de réaliser leurs études uniquement sur des animaux ou des cellules mâles.

Inclusion des genres

Le sexe et le genre sont des concepts distincts, bien qu’ils soient reliés. Ils ne sont plus simplement considérés en fonction de catégories binaires (mâle/femelle, femme/homme). Les comités d’éthique se questionnent de plus en plus sur les stratégies adoptées par les chercheurs pour tenir compte des aspects liés au sexe et au genre des participants dans leurs études. On retrouve toutefois un consensus lié au fait que si on demande à une personne de rapporter son « genre », il n’est pas suffisant de fournir deux choix de réponse; en effet, ceci équivaut à exclure un segment croissant de la population qui ne s’identifie pas à une conception binaire du genre.

Le sexe et le genre dans l’évaluation éthique de la recherche

Nous encourageons les examinateurs membres de comités d’éthique à consulter nos lignes directrices pour l’intégration du sexe et du genre dans les projets de recherche.

L’Institut de la santé des femmes et des hommes a développé des modules interactifs de formation en ligne pour les chercheurs et les évaluateurs sur l’intégration du sexe et du genre dans la recherche en santé. Ces modules sont gratuits et peuvent être complétés en moins d’une heure, en une seule séance ou en segments de 15 minutes. Après avoir réussi ces modules, les participants peuvent télécharger leur Certificat de compétence pour les analyses liées au sexe et au genre.

Implications du sexe et du genre dans l’éthique de la recherche en santé

Les quatre piliers de l’éthique biomédicale généralement reconnusNote en bas de page 8 incluent :

  1. Le respect de l’autonomie
  2. La non-malfaisance
  3. La bienfaisance
  4. La justice
  1. Respect de l’autonomie (ou respect des personnesNote en bas de page 9) : Ce principe vise à assurer que les participants ont le pouvoir de prendre leurs propres décisions et d’agir intentionnellement, en respectant le principe de l’autodétermination. Dans le contexte de la recherche impliquant des êtres humains, ce principe inclut le « consentement éclairé », une étape essentielle au processus de recherche.

    À considérer : Pour exprimer un consentement éclairé, les participants doivent être bien informés sur les risques potentiels associés à leur participation. Nous savons que la majorité des études précliniques sont uniquement réalisées sur des animaux et des cellules mâles. Cependant, dans plusieurs domaines où les deux sexes doivent être pris en compte, il est nécessaire que la recherche clinique inclue des participants des deux sexes.

    Dans les cas où on demande un consentement à des femmes participant aux recherches cliniques, est-il nécessaire de les informer qu’il n’existe pas de données précliniques concernant les effets biologiques de l’intervention sur des femelles?

  2. La non-malfaisance : Ce principe nécessite un engagement fondamental envers l’évitement ou la minimisation des risques de dommages pour les patients ou les participants.

    À considérer : Il a été démontré que les critères diagnostiques pour la dépression sont davantage applicables aux symptômes retrouvés chez les femmesNote en bas de page 10. Cependant, on sait que bien que le nombre de femmes diagnostiquées avec de la dépression soit le double de celui des hommes, les cas de suicides sont trois fois plus nombreux chez les hommesNote en bas de page 10.

    Si le sexe et le genre ne sont pas notés lors des différentes étapes du processus de recherche, comment pouvons-nous déterminer si les risques de dommages ont été identifiés, évités ou minimisés pour tous?

  3. La bienfaisance : Ce principe s’applique au « bien » ou aux bonnes actions réalisées envers les patients ou envers la société en général.

    À considérer : Même si les deux sexes sont inclus dans une recherche, les résultats ne sont pas toujours analysés en fonction du sexe. Des traitements qui pourraient avoir donné de bons résultats chez un sexe pourraient ne pas montrer des effets statistiquement significatifs si les analyses des résultats ne sont pas ventilées en fonction du sexe. Ainsi, des traitements prometteurs, potentiellement bénéfiques pour beaucoup de gens, risquent d’être mis de côté.

    Si les résultats de recherche ne font pas l’objet d’analyses systématiques en fonction du sexe ou du genre, est-il possible que le bien potentiel passe inaperçu?

  4. Justice : Ce principe requiert qu’il y ait une distribution équitable des bienfaits mais aussi des fardeaux liés à la recherche. Dans le contexte de la recherche en santé, la justice comprend « l’obligation morale que les procédures et les résultats associés à la sélection des sujets pour la recherche soient justes »Note en bas de page 11.

    À considérer : Plusieurs chercheurs croient que l’inclusion d’animaux femelles dans la recherche préclinique retardera la recherche et en accroîtra les coûts, en ajoutant de la variabilité aux résultats. Au-delà du fait que des données probantes aient démontré que l’inclusion de femelles n’accroît pas la variabilité des résultatsNote en bas de page 12, le principe de justice requiert que les soucis liés à la commodité et à l’économie n’aient pas préséance sur le principe de distribution équitable des avantages et des fardeaux.

    Si le sexe et le genre ne sont pas adéquatement pris en compte, est-ce que les interventions en soins de santé pourront être aussi efficaces pour les femmes, les hommes, les garçons, les filles et les personnes de divers genres?

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