Prévenir le suicide au Canada – Messages clés

John N. Lavis
Université McMaster

Quel est le problème?

Le décès par suicide représente un important fardeau au Canada, engendré par un ensemble complexe de facteurs interreliés.

Le suicide est la deuxième cause de décès en importance chez les 10 à 19 ans et, en 2009, il était la neuvième cause de décès dans l'ensemble du Canada. Alors que les taux de décès par suicide au sein de la population sont demeurés stables ou ont légèrement diminué au cours de la dernière décennie, les décès par suicide et les comportements suicidaires continuent de toucher certains groupes de façon disproportionnée. Les taux les plus élevés de suicide sont enregistrés chez les personnes qui souffrent de maladie mentale et de dépendances (un trouble mental important est présent dans 90 % des cas de décès par suicide et de tentatives de suicide), chez les gens désavantagés sur le plan socio-économique, les Premières Nations, les Inuits et les Métis, ainsi que les hommes et les garçons.

La prévention du suicide est difficile étant donné que les programmes et les services sont aux prises avec un ensemble complexe de facteurs aux niveaux individuel, interpersonnel, communautaire et sociétal propres à des groupes de culture, d'âge et de sexe différents.

Nous avons besoin d'une approche coordonnée, multidisciplinaire et intersectorielle en matière de prévention du suicide, dotée d'un financement durable à long terme et d'un modèle de gouvernance coordonnée à l'échelle des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, qui correspond au contexte unique du Canada.

Qu'avons-nous appris (des revues systématiques) au sujet des trois éléments suivants susceptibles de résoudre le problème?

Élément 1 – Élaborer et mettre en place des stratégies de prévention du suicide en s'appuyant sur les forces, la résilience et les facteurs immunisants

Nous avons trouvé plusieurs revues systématiques sur des stratégies d'engagement du public comme élément d'établissement des processus par les intervenants du milieu, et sur le soutien à l'utilisation des données de recherche dans le cadre d'une initiative coordonnée d'application des connaissances pour appuyer la mise en place de stratégies de prévention du suicide. Bien qu'aucune des revues n'ait indiqué des avantages directement liés à ces stratégies, elles fournissent cependant de l'information sur leurs composantes principales ainsi que sur le point de vue et l'expérience des intervenants à leur égard.

Élément 2 – Favoriser l'intégration et la coordination des efforts nouveaux et actuels de prévention du suicide dans et entre les secteurs et régions

Plusieurs revues systématiques de grande qualité montrent que les principales composantes de cet élément comportent des avantages, notamment :

  1. les interventions (planification des congés et suivi, interventions en situation de crise, mécanismes de soins intégrés et programme de traitement communautaire dynamique) qui contribuent à élaborer des mécanismes et des ensembles de soins bien définis et à établir la continuité des soins
  2. les équipes multidisciplinaires (p. ex. intervenants sur place et équipes communautaires en santé mentale)
  3. les mécanismes en matière de finances et de ressources pour appuyer l'intégration des soins au sein du système de santé et entre les systèmes de santé et de services sociaux.

Élément 3 – Offrir des programmes d'études et de formation en prévention du suicide

Nous avons trouvé plusieurs revues systématiques mentionnant des avantages relativement aux éléments suivants : la formation sur la prestation de programmes et de services culturellement adaptés (p. ex. interventions en éducation visant à améliorer la communication interculturelle); les interventions qui ont pour but de soutenir l'application de lignes directrices sur les pratiques (p. ex. distribution de matériel didactique, vérification et rétroaction, visites de sensibilisation, leaders d'opinion locaux); campagnes dans les médias de masse qui ont pour objet de changer les comportements en santé (même si aucune revue n'a évalué les campagnes directement liées à la prévention du suicide ou à la santé mentale).

Que doit-on garder à l'esprit lors de la mise en œuvre de ces éléments?

On peut trouver des obstacles à la prévention du suicide au Canada à l'échelle des individus (p. ex. manque de volonté de s'engager dans des processus établis par les intervenants du milieu), des fournisseurs de soins (p. ex. donner la priorité aux soins médicaux aux dépens du travail de prévention), des organisations (p. ex. manque d'intérêt pour la prise d'engagements financiers viables à long terme) et des systèmes (p. ex. manque d'intérêt ou de volonté à l'égard de la contribution à l'élaboration d'un modèle de gouvernance commun). Pour surmonter ces obstacles, il faut être à l'affût des occasions qui se présentent (p. ex. intérêt accru du gouvernement fédéral pour soutenir la prévention du suicide) et apprendre des autres gouvernements qui ont élaboré avec succès des stratégies de prévention du suicide (p. ex. provinces et territoires au Canada et/ou d'autres pays, comme la stratégie nationale de prévention du suicide des États-Unis récemment révisée).

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